Karaté: Histoire
Les origines
Les arts martiaux asiatiques sont intimement liés aux philosophies et religions (Boudhisme, Shintoïsme et Taoïsme), ainsi qu’aux connaissances et techniques médicales (acupuncture, massage énergétique, contrôle de la respiration...).
Ils reposent sur une connaissance fine du corps humain, tant du point de vue anatomique (sens articulaire, zones faibles et solides…) et physiologique (respiration, circulation sanguine…) que psychique (gestion du stress, des peurs, de l’orgueil…).
Légende ou réalité, vers le début du VIème siècle, un moine bouddhiste venu de l'Inde, du nom de Boddhidharma (fondateur du Bouddhisme Zen) arriva au monastère de Shaolin. Il y a développé quelques méthodes d'éducation physique pour ses disciples. En effet, la discipline religieuse dans le temple était si rigide que le rachitisme et la maladie étaient fréquents. Il voulait ainsi apporter la force mentale, la résistance et le pouvoir physique nécessaires à la rude vie à l'intérieur du temple, ceci afin d’accroître le développement spirituel indissociable du corps.
Plus tard, la légende raconte que le temple de Shaolin aurait été détruit dans un incendie et que les moines survivants se seraient dispersés à travers la Chine, propageant leur art de combat sous le nom de "Shaolin Su Kempo", actuellement dénommé "Quan-fa de Shaolin" ou encore "Kung-fu de Shaolin".
Cette ouverture serait à l’origine de diverses méthodes typiques de certaines régions dites du Sud ou du Nord. Par la suite, cet art martial a été importé et divulgué de façon très limitée sur l'île d'Okinawa. Les origines du savoir martial provenaient de notables chinois en remerciement envers certaines familles de marchands okinawaiens. Ces connaissances se sont alors mêlées à des activités traditionnelles locales (danses…)
A partir du XVIème, et ce jusqu'au XIXème siècle, cette île fut le théâtre de conflits entre le Japon et la Chine. Tour à tour, ces deux pays ont imposés leur souveraineté sur l'archipel. A chaque fois l'envahisseur instaura une domination militaire, interdisant toute arme, afin d'éviter les rébellions. Pendant tous ces siècles d'occupation, les techniques de combat à mains nues (To-De) se sont naturellement développées, transmises secrètement, de Maîtres à disciples. L'esprit de résistance, exacerbé par les exactions de l'occupant et allié à l'instinct de survie, ne laissait aucune place au spectaculaire ou à l'esthétique.
L’entraînement avait lieu de nuit et se basait sur l’étude des kata, une éducation physique avec du matériel agraire et beaucoup de travail à deux.
En l'an 1733 naquit à Shuri, Teruya KANGA, qui fut considéré plus tard comme le père fondateur de l'ancienne technique Okinawaienne de combat à main nue. Il entra dans l'histoire sous le nom de Tode SAKUGAWA. Grâce à plusieurs voyages qu'il effectua en Chine pour travailler ses connaissances de l'art, il put étudier et former à son tour différents disciples, à son retour sur l'île d'Okinawa.
A partir du XIXème siècle, l'Okinawa-Te se structura enfin. Plus nombreux furent les experts qui travaillaient ensemble dans la même voie du combat. Parmi eux, un nom que l'on retiendra, celui de Sokon MATSUMURA. C'est lui qui jeta les bases d'un véritable courant de To-De Okinawaien, le Shuri-Te.
En 1868, commença une nouvelle période de l'histoire d'Okinawa, avec la montée sur le trône impérial du jeune Mutsu-HITO. Cela fut une véritable rupture avec un passé féodal puisque le statut de samouraï sera aboli, le port du katana et du chignon interdit. Pour l'Okinawa-Te, c'est la fin de la clandestinité. En l'espace de 20 ans, la motivation dans la pratique de l'art mortel des Ryû Kyû (Okinawa) changea. Celui-ci se transforma lentement de technique guerrière en technique éducative. C’est notamment le maître Anko ITOSU qui introduisit l'Okinawa-Te à l'école en 1902, après avoir très largement modifié les techniques des kata afin de les rendre plus gymniques et moins « dangereuses » (systématisation de la fermeture des mains…) et créé cinq nouveaux kata de base (Pinan qui donneront les Heian), découpé le kata Naifanchi en trois (les trois futurs Tekki).
A partir du XXème siècle, de nombreuses écoles de karaté commencèrent à se distinguer sur l'île d'Okinawa et cela grâce à la formation de nouveaux élèves et aux fusionnements de différents styles. A cette époque, les trois styles de karaté majeurs sont le Shuri-Te, le Naha-Te et le Tomari-Te. (Shuri, Naha et Tomari étant des villages très proches l’un de l’autre).
Il faudra attendre l'an 1916 pour que plusieurs maîtres de l'Okinawa-Te aient l’opportunité de démontrer publiquement leur art qui jusque là était resté secret. L'histoire retiendra le nom de Gichin FUNAKOSHI, originaire de Shuri, qui partit le premier s’installer sur l’Ile principale du Japon. Après avoir dispensé des cours, il sera invité par Jigoro KANO, fondateur du Judo, afin de faire une démonstration lors d'une manifestation importante du Kodokan, en 1922. C’est là que furent adoptés pour la première fois les karaté-gi (ou kimono) et les ceintures noires en référence au système de couleur créé par Maître KANO, alors qu’à Okinawa il n’existait aucune tenue spécifique.
Le public japonais offrira un accueil chaleureux à ce nouvel art du combat totalement inconnu. En 1938, Gichin FUNAKOSHI fonda son propre Dojo à Tokyo, qu'il nomma le Shotokan.
C'est à cette époque également que le nom de Okinawa-Te (la main d’Okinawa) fut changé en celui de Karaté: autre lecture des Kanji (nom des idéogrammes sino-japonais) de To-De (la main de Chine), ceci afin de rompre la tradition chinoise. En effet, la culture Chinoise était dénigrée et les Okinawaiens avaient à cœur d’être intégrés culturellement dans l’Empire Nippon. Le code du guerrier japonais (le Bushido) fut intégré dans le Karaté de FUNAKOSHI par le fils de ce dernier, Yoshitaka « Gigo » FUNAKOSHI qui sera sont successeur.
GICHIN FUNAKOSHI
Le Karaté s'est répandu dans le monde (Europe, Afrique, Amérique…) après la seconde guerre mondiale grâce à la mobilité des représentants des différents styles ainsi qu’à la divulgation à des non-japonais se présentant dans les Dojo.
Le Karaté continuera sa mutation au contact d’autres cultures pour intégrer la notion de sportivité et les premiers championnats du monde de Karaté se déroulèrent à Tokyo en 1970 ; et c'est à cette occasion que fut créée la Fédération Internationale de Karaté (WKF, World Karaté Federation). Actuellement, il existe de nombreux styles de Karaté, mais les 7 principaux sont :
- Shorin-ryu : (style de Shaolin) est le style le plus ancien mais connaissant de multiples variantes.
- Shotokan-ryu : (l’école de « la maison de Shoto », Shoto étant le nom de plume de Gichin FUNAKOSHI). Style de Karaté fondé en 1938 et issu du Shorin–ryu d’ Okinawa introduit par le FUNAKOSHI père. Mais c’est son fils Yoshitaka qui fut à l’origine du style tel qu’on le connait désormais.
- Shotokaï-ryu : (l’association de Shoto). Association fondée en 1935 par les disciples de Gichin FUNAKOSHI mais ne devient un style de Karaté à part entière qu’en 1957 sous l’égide de Shigeru EGAMI. Ce style se veut être le prolongement des recherches de Yoshitaka FUNAKOSHI (Shotokan) et intègre des techniques et notions propres à l’AÏKIDO afin de rendre la méthode d’avantage en rapport avec les traditions martiales japonaises (Budo).
- Wado-ryu : (la Voie de l’Harmonie) style japonais de Karaté créé en 1939 par Hironori OTSUKA. Celui-ci était maître de Jujitsu lorsqu’il découvrit le Karaté sous la férule de Gichin FUNAKOSHI. Il complètera quelques lacunes grâce à ses connaissances initiales et à la pratique du Shito ryu afin de créer son style plus proche du Budo.
- Shito-ryu : Style de Karaté d’Okinawa créé en 1934 par Kenwa MABUNI. Le fondateur fut un élève brillant des 2 grands maîtres de l’île : Anko ITOSU du Shorin-ryu, et Kanryo HIGAONNA du Shorei-ryu.
- Goju-ryu : (Style du « dur et du souple »). Style de Karaté prenant son origine dans le Naha-té (puis Shorei-ryu) d’Okinawa et fondé par Chojun MIYAGI en 1926. La branche japonaise du Goju-ryu fut initiée par Gogen YAMAGUCHI.
- Kyokushinkaï : (l’école de « l’Ultime Vérité »). Style créé en 1955 par Masutatsu OYAMA à partir du Goju-ryu et de quelques éléments du Shotokan. Cette école est basée sur la notion de contact plein sans protections. Son fondateur inscrira son école dans la légende en participant à différentes formes de duels et de spectaculaires démonstrations de casses.
Ces différents styles connaissent souvent des variantes pouvant même être à l’origine de conflits de notions historiques, techniques ou théoriques (Shotokan JKA et SKI…). Ces 7 piliers sont eux-mêmes à l’origine d’autres écoles ayant développés certaines particularités, à titre d’exemple :
- Le Shintaïdo de Me AOKI découle du Shotokaï-ryu.
- Le Shukokaï de Me TANI découle du Shito-ryu.
- Le Sankukai de Me NANBU est une variante du Shukokaï.
- Les styles Ashiara de Me ASHIARA, Shidokan de Me SOENO découlent du Kyokushinkaï…
Tout au long de son histoire, le Karaté ne cessera d’évoluer en formes et techniques. Il en est de même concernant le courant sportif puisqu’il existe une multitude de formes de compétition : combat de non contact, contact limité et réglementé, avec ou sans protections, de kata individuel ou en équipe, de chorégraphie en duo etc.…
Nous retiendrons sur ce point, que les compétitions de Full Contact inventées aux Etats Unis provenaient directement du Karaté et que cette forme de confrontation aboutira à la création d’un sport à part entière qui est la boxe américaine. Le Karaté est aujourd'hui un art martial très populaire dans le monde.
Il y a actuellement plus de 200000 licenciés en France au sein de la FFKDA, seule fédération délégataire de « Jeunesse et Sports » habilitée à délivrer des Dans, organiser les compétitions et former des cadres. Les karatékas seraient environ quinze millions dans le monde.
Biographie : SENSEI SHIGERU EGAMI

Shigeru EGAMI est né le 7 décembre 1912 à Fukuoka-ken, dans l’île de Kyushu.
Il entra en 1932 à l'université de Waseda où il étudia sous la direction du Sensei SHIMODA, qui décédera prématurément, et participa, avec Yoshitaka FUNAKOSHI, le fils du Maître, appelé aussi Gigo, à plusieurs démonstrations à Nagoya, Kobé, Yawata et Wakamatsu. Shigeru EGAMI se destinait au Karaté Do et devint membre du Karaté-Kenkyu-kai. En 1935, l'association Shotokaï rassemblait les disciples du Maître FUNAKOSHI. Le Maître EGAMI secondait Maître FUNAKOSHI et devint membre du jury au sein du siège de la Shotokan.
En septembre 1955, Maître EGAMI devint Shihan du club de Karaté de l'université de Gakushuin.
Le 26 avril 1957, le Maître Gichin FUNAKOSHI décédait. Le 1er septembre s’ouvrit le Tokyu Karaté Dojo et Maître EGAMI fut en nommé officiellement le Shihan. En octobre, il devint également le Shihan du club de Karaté des universités de Chuo et de Toho. L'association Shotokaï se reconstitua conformément aux dernières volontés de son fondateur; en tant que dépositaire du Karaté-do créé par le Maître FUNAKOSHI, Shigeru EGAMI insuffla une nouvelle dimension à cet art qui, comme l’Aïkido de Maître UESHIBA, s’apparente désormais totalement au Budo.
Le Maître EGAMI encouragea la création d'écoles au Japon et dans le monde entier. En novembre 1970, il publia "Karaté Do, à l'usage des professionnels". Il supervisa, en 1975, la reconstruction du Shotokan Dojo, à Tokyo, Shibaura (actuellement à Mejiro, Toshima-ku), et en devint, dès 1976, le directeur technique. En juin de la même année, il visita cinq pays d'Europe, dont la France où l'accueillit le représentant de son association Yukentai, le Maître Tetsuji MURAKAMI.
Le 8 janvier 1981, Shigeru EGAMI décéda à Tokyo des suites d’une longue maladie.
Biographie : SENSEI TETSUJI MURAKAMI

Tetsuji MURAKAMI naquit à Shiozuka en 1927. Après avoir pratiqué le Kendo, obligatoire dans les écoles pendant la guerre, il s'inscrivit à 19 ans, au dojo de Karaté de Maître YAMAGUSHI, un des tous premiers élèves de Maître FUNAKOSHI.
Ce fut en 1946 que Tetsuji MURAKAMI découvrit le Karaté et qu’il se passionna pour les cours exigeants de Maître YAMAGUSHI pendant les 10 années suivantes.
Arrivé à Paris en 1957 sous la demande des instances françaises (Henry PLÉE), il fut le premier professeur de Karaté Shotokan en France.
Il enseignait alors le Shotokan à Paris et découvrit le Karaté do Shotokaï développé par Maître EGAMI lors d'un séjour au Japon en 1968. Cette rencontre fut déterminante et Tetsuji MURAKAMI prit la décision de modifier son approche du Karaté Do, en se consacrant à la pratique du Karaté do Shotokaï.
Ce fut en 1969 qu'il créa l'association "Murakami-Kai" et en 1986 l'association "Shotokaï France". Ces associations étaient les dépositaires de l'enseignement du Maître. C'était sous sa direction que s'effectuait tous les ans, un passage de grade spécial pour ceintures noires Shotokaï. Maître MURAKAMI décéda le 24 janvier 1987 à Paris.
Maître Tetsuji MURAKAMI enseignait dans l'esprit des Arts Martiaux et non comme un sport. Il exigeait grande rigueur d'esprit et dans le travail, une volonté de repousser toujours plus loin la résistance physique, un effort constant pour améliorer et parfaire une technique.
Biographie : SENSEI MITSUSUKE HARADA

Mitsusuke HARADA, fils d’un officier de l’armée japonaise, naquit en Mandchourie en 1928. Sa famille et lui quittèrent la Chine lorsqu’il atteignit l’âge de 9 ans et ils retournèrent à Tokyo (Japon). Il commença à pratiquer le Karaté Do à l’âge de 15 ans, en 1943, avec Yoshitaka FUNAKOSHI Sensei. En 1948, il entama ses études en économie et finance au sein de l’Université de Waseda et poursuivit son entraînement en Karaté. Il suivit l’instruction de sempai renommés et une fois par semaine, O’sensei Gichin Funakoshi venait superviser les cours. Un des instructeurs du Shotokan Dojo de Gichin FUNAKOSHI, Shigeru EGAMI, remarqua la dextérité de Mitsusuke HARADA et l’invita à s’entraîner personnellement avec lui, cela durant 3 ans. En seulement 8 années de pratique assidue du Karaté, Mitsusuke HARADA se vit remettre son 5ème dan, en 1956, des mains même de Gichin FUNAKOSHI.
En 1948, il entama ses études en économie et finance au sein de l’Université de Waseda et poursuivit son entraînement en Karaté. Il suivit l’instruction de sempai renommés et une fois par semaine, O’sensei Gichin Funakoshi venait superviser les cours. Un des instructeurs du Shotokan Dojo de Gichin FUNAKOSHI, Shigeru EGAMI, remarqua la dextérité de Mitsusuke HARADA et l’invita à s’entraîner personnellement avec lui, ceci durant 3 ans. En seulement 8 années de pratique assidue du Karaté, Mitsusuke HARADA se vit remettre son 5ème dan, en 1956, des mains même de Gichin FUNAKOSHI.
Il partit pour le Brésil pour y enseigner le style Shotokaï, jusqu’en 1962 (Pour l'anecdote, il fut désigné pour occuper la fonction de garde du corps, lors de la visite du couple princier japonais à Sao Polo, en juin 1958). Il fut invité à Paris en 1963, par OSHIMA Sensei (un ancien condisciple de l’université de Waseda), en tant qu’enseignant. Cependant, à cause d’un problème de visa, il fut contraint par les autorités françaises de quitter le territoire. Il partit alors enseigner en Belgique, puis en Grande-Bretagne, où il devait définitivement s’installer (à Cardiff). De là, il put diriger le Shotokaï en Europe. En 1965, en tant que représentant officiel du style Shotokaï et de Shigeru EGAMI en Europe, il fonda l’organisation K.D.S (Karaté Do Shotokaï) au Royaume-Uni, qui se propagea dans le monde par la suite.
A l’âge de 78 ans, Harada sensei enseigne toujours son art avec la même passion et la même détermination, au travers des stages K.D.S. qu’il dirige encore à travers le monde.